L’élection Presidentielle Au Mali Se Déroule Dans Un Climat En Grande Partie Pacifique
Bamako, Mali – Le 28 juillet 2013, les électeurs maliens se sont rendus aux urnes pour élire un nouveau Président. Il s’agit de la première élection depuis le coup d’Etat qui avait déchu l’ancien Président et conduit à un gouvernement de transition. Ce scrutin marque une étape importante pour le peuple malien, qui a voté dans l’espoir de retrouver une stabilité politique. Après une campagne apaisée entre 28 candidats, le vainqueur doit désormais réunir 50 pour cent des votes; à défaut un second tour opposera les deux candidats ayant obtenu le plus de voix au premier tour. Le Ministère de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales dispose de cinq jours pour proclamer et transmettre les résultats provisoires à la Cour constitutionnelle, qui annoncera le vainqueur, avant la tenue d’un éventuel second tour, prévu pour le 11 août.
La tenue de l’élection présidentielle a notamment été rendue possible grâce aux efforts conjugués du Ministère de l’Administration Territoriale (MATDAT), de la Direction Générale des Élections (DGE) et de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), ainsi que de la MINUSMA et de l’Opération Serval notamment en ce qui concerne la logistique et la sécurisation de l’élection, afin que chaque électeur puisse détenir sa carte NINA (Numéro d’Identification Nationale), retenue comme l’unique document biométrique donnant droit au vote. La distribution et l’obtention de la carte NINA ont constitué un défi important pour les Maliens et le gouvernement du Mali, ce dernier devant s’assurer que 6.8 millions d’électeurs disposent de la nouvelle carte à temps pour l’élection. Malgré ces efforts, il faut noter que plusieurs milliers d’électeurs ont pourtant été privés du droit de vote, notamment en raison du court délai imparti pour préparer les élections, selon les modalités établies dans la feuille de route de janvier 2013 qui a été adoptée par le gouvernement de transition. Ces groupes comprennent les réfugiés qui ont dû fuir les violences au Nord du Mali, les réfugiés vivant dans des camps dans certains pays voisins, et enfin, les jeunes ayant atteint l’âge de voter après le recensement et qui, de facto, n’ont pas été inclus dans le décompte des nouvelles cartes. La feuille de route envisageait la tenue des élections présidentielle et législatives pour la fin du mois juillet 2013. Pour les élections législatives qui doivent se tenir dans les mois à venir, le gouvernement du Mali est encouragé à renforcer ses efforts afin que les cartes NINA puissent être à la disposition du plus grand nombre de citoyens, réduisant ainsi le nombre le personnes privées du droit de vote.
IRI a conduit une mission d’évaluation de l’élection afin d’observer l’avancement et l’engagement des Maliens en faveur d’un retour à une démocratie plus forte. Le jour du scrutin, l’IRI a déployé huit équipes, cinq dans le District de Bamako et trois respectivement à Koulikoro, Sikasso et Ségou: l’IRI a ainsi observé les opérations de vote dans plus de 120 bureaux. Globalement, le scrutin s’est déroulé dans un climat paisible. Les observateurs ont constaté une participation importante d’un personnel électoral formé, d’un grand nombre de jeunes citoyens, de représentants des entités gouvernementales, de groupes d’observateurs nationaux, d’observateurs de la Cour constitutionnelle, d’un grand nombre de mandataires des candidats ou représentants des partis politiques et d’observateurs internationaux. Les observateurs de l’IRI ont également constaté que les électrices maliennes se sont massivement mobilisées le jour de l’élection.
Les équipes d’observateurs de l’IRI ont noté que les procédures électorales dans les bureaux de vote n’étaient pas homogènes. Néanmoins, ces mêmes équipes ont observé un processus largement transparent au niveau des bureaux de vote, les agents électoraux faisant un effort de bonne foi pour conduire au mieux, et selon les contingences logistiques, le processus selon les procédures.
Les observateurs nationaux et internationaux n’ont pas été autorisés à assister au processus de décompte des voix au Centre national de Bamako. Le manque de transparence à ce niveau du processus électoral est regrettable et pourrait faire l’objet d’une réflexion pour les futurs scrutins.
L’IRI reconnait que les élections sont des processus complexes qui comprennent plusieurs étapes telles que: l’inscription des électeurs et des candidats; la période de campagne; le jour de l’élection; la clôture des bureaux de vote et le décompte des voix; l’arbitrage des plaintes et l’acceptation des résultats. Le processus électoral ne peut pas être séparé du cadre politique et juridique avec lequel il opère. Il convient de féliciter le gouvernement du Mali pour la mise en place d’un cadre électoral qui a permis un processus transparent, ainsi qu’une campagne active et pluraliste. Les entités gouvernementales et les autres partenaires ont ainsi mené les préparations de l’élection dans un délai restreint en tenant compte de la question sécuritaire. Le MATDAT doit être particulièrement félicité pour ses efforts afin d’atteindre le plus grand nombre d’électeurs et leur transmettre l’information relative aux modalités d’obtention de la carte NINA et afin qu’ils puissent identifier leurs bureaux de vote, y compris à travers un système de messagerie innovant. Les citoyens du Mali devraient être fiers des efforts qu’ls ont entrepris et pour leur mobilisation en nombre supérieur aux scrutins passés.
Les candidats doivent également être félicités pour avoir mené des campagnes largement respectueuses des autres candidats tout en se focalisant sur des questions de citoyenneté. Les dispositions qui permettent le financement public des partis politiques constituent un élément positif, mais des améliorations peuvent encore être apportées pour les futurs scrutins.
La délégation de l’IRI formule les recommandations préliminaires suivantes sous forme de feuille de route pour les futures élections. Ces recommandations seront détaillées et renforcées dans un rapport final que l’IRI publiera dans les prochaines semaines.
- Accroitre les efforts pour enregistrer tous les citoyens en âge de voter, y compris les personnes déplacées, les réfugiés et les électeurs ayant atteint l’âge de voter (18 ans);
- Définir les sources et les plafonds des contributions remboursables en ce qui concerne le financement des campagnes électorales;
- Codifier les meilleures pratiques des organes permanents de gestion des élections afin d’assurer leur respect lors de futures élections;
- Définir plus en détail la règlementation et la régulation applicables en période de campagne électorale;
- Adopter un processus simplifié pour que les électeurs puissent identifier leurs bureaux de vote;
- Permettre aux observateurs d’assister au décompte des votes aux niveaux local et national;
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Définir un délai spécifique pour la proclamation des résultats définitifs du premier tour permettant aux candidats du second tour de disposer d’un délai suffisant pour formuler leurs éventuels recours et facilitant la préparation du second tour.
La délégation comprenait les personnes suivantes :
- Mauril Bélanger, membre du Parlement du Canada (circonscription d’Ottawa-Vanier);
- Kamissa Camara (Etats-Unis), Chargée du programme Afrique de l’Ouest à La Fondation Nationale pour la Démocratie;
- Charles Cloutier (Canada), Vice Président du Forum des Fédérations;
- Jennifer Cooke (Etats-Unis), Directrice du programme Afrique au Centre d’Etudes Stratégiques et Internationales;
- Vivian Lowery Derryck (Etats-Unis), Présidente et PDG de l’Institut Bridges;
- Patrick Muyaya, (RDC) membre du Parlement de la République Démocratique du Congo;
- Bernadette Paolo (Etats-Unis), Présidente et PDG de la Société d’Afrique du Sommet National Africain;
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Josh Scheinert (Canada), membre associé de droit international à Appleton et Associates.
Le personnel de l’IRI a également participé également à la mission d’évaluation. Il était dirigé par Thomas E. Garrett, Vice Président des Programmes de l’IRI; Gretchen Birkle, Directrice de la division d’Afrique; et Nicolas Teindas, Directeur Résident de IRI pour le Mali.
La mission d’évaluation de l’IRI est financée par le Ministère canadien des Affaires Etrangères, du Commerce et du Développement. Depuis 1983, l’IRI a suivi plus de 150 élections dans plus de 46 pays.